Cette jurisprudence illustre le recours croissant par les salariés, leurs représentants et les tribunaux à la notion de co- emploi, particulièrement dans les groupes internationaux confrontés à des fermetures de sites ou d’entreprises en France.

Ainsi, le Conseil de prud’hommes de Compiègne a invalidé près de 700 licenciements économiques résultant de la fermeture du site  de l’usine Continental, au motif que la société  employeur, mais  également la société mère allemande, considérée comme co-employeur, ne rapportaient pas la preuve de difficultés économiques et  de menaces sur la compétitivité et avaient manqué à leur obligation de reclassement.

Pour qualifier la société-mère de co-employeur, le juge a constaté que :

  • la décision de restructuration avait été prise au niveau de la Direction de la société-mère, dans la mesure où les dirigeants de ladite société s’étaient exprimés dans les médias français et allemands sur le projet de restructuration, que ces mêmes dirigeants avaient rencontré différents représentants de l’Etat français et que la société avait été partie au préaccord de méthode ;
  • la filiale française était totalement placée sous la dépendance du groupe et ne possédait aucune marge de manœuvre quant à la gestion de son activité ;
  • la société-mère s’occupait de la gestion des ressources humaines, dans la mesure où cette dernière avait géré la procédure de reclassement dans son intégralité.

Le juge en a déduit que la société-mère s’immisçait de façon anormale dans le fonctionnement de sa filiale, évoquant une « apparence d’immixtion dans la direction de la filiale » qui se trouvait de fait dessaisie de tout pouvoir d’activité et de direction. Il précise que la lettre de licenciement aurait dû faire mention d’un motif économique propre à la société-mère reconnue co-employeur. A défaut d’une telle motivation, le licenciement doit être considéré comme sans cause réelle et sérieuse.