La gestion des coûts liés à un litige est au cœur des préoccupations des sociétés, particulièrement dans le contexte économique difficile actuel. Une gestion efficace des litiges n’est pas seulement la clé pour réduire les coûts; elle permet également d’obtenir des résultats souhaitables rapidement. Voici quelques idées à suivre pour y arriver :

  1. Évaluation préliminaire approfondie : Une analyse détaillée du bien-fondé d’une cause doit être faite dès le départ. Même si elle exige un investissement important dans les premières étapes d’un litige, cette analyse ménagera les ressources à long terme et aidera à évaluer les risques et à obtenir un règlement rapidement. Si un défendeur évalue que son dossier est faible, il lui sera préférable d’obtenir un règlement rapide afin d’éviter que la partie adverse n’apprenne des faits sous-jacents qui pourraient être découverts plus tard à l’étape de la communication préalable. Si l’évaluation préliminaire révèle plutôt un dossier solide, elle présentera généralement des stratégies à déployer pour aider à remporter la cause ou à obtenir rapidement un règlement favorable. Une évaluation préliminaire simplifie également le traitement d’un dossier afin que tout soit fait progressivement et dans l’ordre. Le secret d’une évaluation préliminaire réussie est de réaliser une sorte d’analyse des probabilités, ou un « arbre à risques », qui déterminera les résultats probables et qui permettra, en général, d’établir le montant approximatif d’une réclamation. De plus, cette évaluation permettra de savoir s’il existe des enjeux importants en matière de relations publiques, de politiques d’entreprise ou de relations d’affaires qui pourraient notamment être liés à la réputation des représentants de la société, et elle permet de savoir si l’assurance des dirigeants et administrateurs pourrait entrer en jeu. Tous ces éléments seront pris en compte au moment du choix de stratégies en vue d’obtenir un règlement.  
  2. Déterminationdes objectifs du litige : Ce ne sont pas tous les litiges qui mettent en péril une société et requièrent une foule de ressources. Parfois, offrir un paiement modeste et obtenir la signature d’une entente de confidentialité tôt dans le processus peut éviter d’exaspérer un demandeur plein de ressources qui pourrait devenir le requérant pour un recours collectif. Puisque tous les litiges ne se ressemblent pas, il convient d’adopter une approche de triage pour s’assurer que les ressources adéquates soient mobilisées. Il faudrait toujours envisager des approches novatrices et non conventionnelles à la lumière des objectifs du litige, plutôt que d’adopter une approche vindicative.  
  3. Recours à un plan de litige : Après avoir procédé à l’évaluation préliminaire, et si l’affaire ne peut être réglée à l’amiable, un plan de litige devrait être préparé, comprenant, entre autres, un plan d’action par rapport aux enjeux, une description des besoins en matière de preuve, les exigences propres aux enquêtes ainsi que les étapes à suivre pour réaliser le processus. Toutes les éventualités ne sont pas prévisibles dans le cas d’un litige, c’est pourquoi il est important de revoir le plan de litige à l’occasion. L’absence de plan peut entraîner un grand manque d’efficacité.  
  4. Budget : Un élément essentiel de tout plan de litige consiste à établir un budget. Bien sûr, en raison des incertitudes et aléas liés à un litige, l’établissement d’un budget à long terme peut se révéler difficile dans de nombreux cas. Par contre, le fait de tenter l’exercice ajoute de la discipline au processus, surtout si les coûts et les attentes divergent. La réévaluation et la mise à jour du budget présentent plusieurs avantages; elles obligent notamment les conseillers juridiques à envisager certaines avenues, de même que les coûts et les risques qui y sont associés.  
  5. Les taux horaires facturables ne disent pas tout : Trop souvent, les coûts d’un litige sont évalués en se fondant uniquement sur la première réaction aux taux horaires facturables des avocats responsables. De toute évidence, de nombreux facteurs entrent en ligne de compte dans le calcul du coût total d’un litige, et le fait de mettre l’accent uniquement sur les taux horaires facturables peut se révéler très coûteux. Le fait qu’un avocat chevronné s’occupe d’un dossier, ou du moins le supervise, peut faire économiser des milliers de dollars et offrir de bien meilleurs résultats que le fait de retenir les services d’un avocat à taux plus abordable, mais qui passera plus de temps sur un dossier, ou qui pourrait ne pas reconnaître un moyen efficace de régler un différend.   
  6. Des demandes procédurales pour économiser : Des demandes procédurales qui ont peu ou pas de répercussions sur le résultat surviennent trop fréquemment dans les litiges. D’autres demandes sont relativement abordables si l’on tient compte des économies qu’elles peuvent entraîner. Par exemple, toutes les provinces de common law reconnaissent la compétence inhérente des tribunaux de rendre une ordonnance de cautionnement pour frais lorsqu’ils le jugent nécessaire. Le fait d’obliger un demandeur à fournir un cautionnement pour frais permet d’éviter que le demandeur se lance dans un litige sans nécessairement en avoir les moyens et peut inciter une partie à accepter une offre de règlement raisonnable ou à adopter une approche réaliste par rapport au litige. Dans certains cas, si une partie ne fournit pas le cautionnement pour frais qui lui a été demandé, l’action sera rejetée. Un autre exemple de demande procédurale permettant d’économiser consiste à demander les détails d’une réclamation ou à utiliser des avis pour admettre les faits. Dans ces deux cas, en plus de limiter la portée générale de la réclamation, on réduit de façon importante les obligations liées à la production de documents, ainsi que les coûts connexes d’un défendeur.  
  7. Gestion efficace du personnel : Pour éviter que les négociations ne tournent au vinaigre, il faut s’assurer que l’intervenant principal qui négocie avec un demandeur potentiel ou un groupe de demandeurs soit la bonne personne. En effet, bien souvent, la personne la plus impliquée dans le différend n’est pas nécessairement la plus indiquée pour tenter un règlement une fois le processus de litige enclenché, malgré sa grande connaissance du dossier. Elle peut ressentir le besoin de justifier les mesures prises antérieurement, ce qui peut nuire à son efficacité en cours de règlement du différend, avant ou pendant le litige. Il est primordial de choisir soigneusement les personnes qui seront chargées de négocier un différend; cela se traduira par une plus grande efficacité et de meilleures chances de conclure un règlement favorable.  
  8. Recours à des parajuristes et à des consultants : Selon la nature du différend, il est possible de faire de grandes économies en ayant recours aux services de parajuristes et/ou de consultants. Certaines tâches non liées à la prestation de conseils juridiques (gestion de documents, recherches sur des sociétés) peuvent être effectuées plus efficacement et à un taux horaire moindre par des parajuristes ou des consultants. Une répartition efficace du travail, en confiant des tâches à des personnes compétentes dont les taux horaires sont moins élevés, est un autre élément essentiel de la gestion efficace d’un litige.  
  9. Offres formelles de règlement à l’amiable : De nombreux territoires de common law au Canada ont adopté des procédures permettant à une partie d’offrir un règlement à l’amiable formel sans aveu de responsabilité. Si l’offre n’est pas acceptée et que le montant accordé par le tribunal par la suite est plus élevé, la partie ayant refusé l’offre initiale pourrait voir ses coûts augmenter. Lorsqu’il s’agit de litiges d’envergure, la possibilité de tels coûts supplémentaires peut inciter la partie adverse à accepter l’offre de règlement.   
  10. Se concentrer sur les résultats : Les litiges qui s’en tiennent trop au processus établi engendrent parfois des coûts considérables et font oublier l’objectif : obtenir les résultats recherchés. En plus des méthodes pour économiser présentées ci-dessus, une évaluation continue devrait être effectuée pour déterminer si les coûts liés à l’atteinte des objectifs du litige et à l’obtention des résultats sont bien contrôlés. Il va de soi qu’il est plus satisfaisant d’avoir gain de cause à un coût raisonnable que de perdre sans avoir trop dépensé. Le succès d’un litige et le contrôle des coûts ne sont pas nécessairement incompatibles; il suffit de gérer le dossier avec soin et de faire appel à des conseillers juridiques expérimentés et compétents.