BAKER & Mc-KENZIE
[Text Box: Lena Sersiron Avocate associee Baker & McKenzie SCP] [Text Box: 1 Droit de la concurrence : un pas en avant deux pas en arriere I juillet 2016] Droit de la concurrence : un pas en avant deux pas en arriere
Par Lena Sersiron, avocate associee au cabinet Baker & McKenzie Paris.
Publie le 11 juillet 2016 dans Option Finance.
Si la Cour de justice de l'Union europeenne (CJUE) a trouve le «juste milieu», cher a Aristote, dans ses arrets du 10 mars 2016 relatifs a la motivation des decisions par lesquelles la Commission demande des renseignements aux entreprises, la Cour de cassation s'en est considerablement eloignee dans ses arrets du 9 mars 2016, sacrifiant les droits de la defense des entreprises sur l'autel de la sacro-sainte efficacite de la procedure d'enquete de concurrence.
La CJUE s'est ainsi penchee sur l'epineuse question des demandes d'informations massives de la Commission faites aux entreprises par voie de decision. Elle y rappelle a l'ordre la Commission quant a la necessite de motiver ce type de decision, prealable indispensable pour permettre au juge d'exercer un controle effectif en appreciant le caractere justifie de la demande de renseignements. II s'agit IA de trouver le point d'equilibre entre la preservation de l'efficacite de l'enquete et le respect des droits de la defense de sorte que la Commission doit agir en «indiquant clairement les presomptions qu'elle entend verifier» afin de respecter les droits de la defense.
Si les entreprises sont tenues de cooperer, sous peine de lourdes sanctions financieres, elles doivent pouvoir mesurer la pollee de ce devoir de collaboration, ce qu'elles ne peuvent pas faire des lors que la motivation de la demande est «excessivement succincte, vague et generique» selon la CJUE.
La CJUE envoie donc un coup de semonce a la Commission qui a trop souvent transforms ces demandes de renseignements en enquetes exploratoires (en l'espece un questionnaire de 94 pages avec 11 series de questions relatives a des «informations extremement vastes et detainees»). On aurait aims lire la prose des juges du Luxembourg quant au point des conclusions de l'avocat general, Nils Wahl, qui decriait la veritable «externalisation» du dossier d'enquete. Seul regret donc, la Cour s'en tient a l'annulation de la decision pour insuffisance de motivation sans que Ion sache si une demande d'une telle ampleur eat ete admise en presence d'une motivation idoine.
Tout a son ceuvre de preservation de l'efficacite des enquetes de concurrence, la Cour de cessation en rendant son arret du 9 mars 2016, a ete bien moins inspiree que la CJUE.