Le 16 mai dernier, les eurodéputés ont adopté, à une écrasante majorité, une Résolution relative à l’utilisation efficace des ressources, présentée par la députée Bilijana Borzan (commission ENVI), qui propose de réduire le gaspillage alimentaire de moitié d’ici 2030, notamment en levant les restrictions sur les dons alimentaires et en clarifiant les informations aux consommateurs[1].

Cette initiative s’inscrit dans la droite ligne du vote, le 14 mars dernier, de la proposition législative relative aux déchets, soumise par la Commission européenne dans le cadre de son plan d’action en faveur de l’économie circulaire, dans laquelleont été intégrées, sur maendements, une définition européenne de la notion de gaspillage alimentaire, ainsi qu’une hiérarchie de traitement des déchets alimentaires et des méthodes de mesures harmonisées.

Une obligation morale et technique de l’Union européenne

Selon Bilijana Borzan, « L’Union européenne est l’une des communautés les plus riches et les plus prospères au monde. Elle a donc l’obligation morale et politique de réduire les énormes quantités de denrées alimentaires gaspillées »

Certes, au niveau national, les Etats Membres ont déjà adopté de multiples mesures afin de réduire le gaspillage alimentaire, allant de la loi du « bon Saint-Maritain » en Italie, à de simples incitations fiscales au Portugal ou en Espagne, en passant par la sanction des supermarchés qui jetteraient leurs invendus, en France.

Mais d’un point de vue technique, le gaspillage alimentaire touche l’ensemble de la chaîne alimentaire, de l’étable à la table. Il apparait donc logique de combler les lacunes du cadre règlementaire alimentaire, de manière harmonisée à l’échelle européenne.

De la sécurité au gaspillage alimentaire

Le fil directeur de la législation européenne reste la sécurité de tous les produits alimentaires mis sur le marché. L’enjeux est donc de fournir aux opérateurs économiques, comme aux consommateurs, les moyens de donner ou de réutiliser les aliments encore consommables, sans compromettre leur sécurité.

En effet, le gaspillage alimentaire est, en majeure partie, généré par les ménages (53%), qui surconsomment, ou ne comprennent pas la différence entre les mentions « à consommer de préférence avant … » et « à consommer avant … », jetant, par suite, d’importantes quantités de denrées encore consommables. Le retrait des dates sur certains aliments pourrait ainsi limiter le gaspillage, sans compromettre leur sécurité. C’est en ce sens que les députés appellent la Commission à agir.

Concernant le gaspillage généré par les industriels, il conviendrait, selon les parlementaires, de modifier certaines règles de sécurité, d’hygiène et de traçabilité lorsque les industrielssouhaitent donner, ou réutiliser des denrées encore viables. La Commission envisage l’adoption de guidelines, afin d’assouplir, en ce sens, la législation européenne. Les parlementaires ont également appelé de leurs vœux, la prise de mesures incitatives, telle qu’une exemption fiscale des dons alimentaires que la Commission pourrait insérer dans la directive sur la TVA, ou le financement des coûts par le Fonds européen d’aide aux plus démunis.

Enfin, certains eurodéputés ont souligné que la prise en compte du secteur agricole dans l’action de l’UE permettrait de gérer les problèmes liés à des politiques de surproduction, ainsi qu’aux normes de standardisation qui imposent de jeter les fruits et légumes « moches ».

Ainsi, en proposant des mesures concrètes sur l’ensemble de la chaine alimentaire, les parlementaires entendent aller beaucoup plus loin que la Commission européenne, qui reste timide sur le sujet. Le Conseil devrait, à son tour, se prononcer sur la proposition législative amendée par les eurodéputés qui lui a été transmise en mars.